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Le Mont Darfer

Le Mont Darfer d'Ejiom Suel à lire sans modération.

En vente chez ediivre.com

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Le petit nouveau "Au bout du compte"

né le 24 janvier 2011

chez edilivre.com  

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18 décembre 2009 5 18 /12 /décembre /2009 07:07

En commun à chaque période de ma pré-existence, une peur viscérale, insoutenable qui me prenait au moment de dormir : La MORT.

Comment lui échapper ?

Comment me faire oublier d’elle ?

Me faire oublier de cette “amie” trop fidèle, là, du tout premier au tout dernier jour !

Avec la Vérité, c’est aujourd’hui ma meilleure compagne.

Sans encore lui tendre facilement la main, je la laisse nous suivre, emprunter nos chemins. Elle nous rattrapera le jour de son choix. Elle m’a pris des amis, je ne lui en veux pas, je ne li en veux plus car c’est pour mieux me préparer, m’apprendre à mieux, le jour venu, sauter le pas et surtout, avant, à mieux marcher bien droit sans plus de crainte, sans plus d’erreurs. Trente ans durant elle m’a fait peur. Je me souviens de ces nuits...



Minuit,

assise, je travaille,

poèmes, essais ou prose.

J’invente, j’écris, je baille...

Il est tard,

à peine si j’ose...

Et soudain ils résonnent

sourds, lents, lugubres.

Douze coups!

Les étoiles s’éteignent,

seule la lune demeure comme un grand candélabre à la lueur blafarde.

J’ai peur !

Je sais qu’ils vont surgir des fin fonds des ténèbres.

Blancs fantômes,

ils sont là,

je les sens,

invisibles, ils me frôlent.
  plus de rimes, plus de vers,

ma plume s’est envolée au vent du courant d’air.

Ils retiennent ma main.

Ils veulent extraire mon âme pour m’emmener avec eux.

“Souviens-toi” Hurlent-ils.

J’ai peur !

je les aimais pourtant,

la mort me les a pris,

j’étouffe.

J’ai peur de les revoir ici où ils venaient jadis.
  Je leur ouvrais mon coeur à chaque coup du heurtoir dont ils frappaient ma porte.

La mort me les a pris,

et je tremble chaque soir

aux douze coups de minuit

qu’ils tapent inlassables

au mur de ma folie. 



Ejiom, petite fille Ejiom a toujours su et les autres riaient de ne pas la comprendre. Elle divaguait... Elle divague encore ! Ame bercée au flux et au reflux de ses rêves, attirée et lassée. Une âme vagabonde au coude de Villon, aux genoux de Ronsard, accrochée aux galoches de Ribaud, alanguie aux soupirs de Beaudelaire... Une âme amoureuse sans cesse d’un visage ou d’un geste, fidèle, patiente ou impatiente, en a-t-elle connu des poètes crottés ou reluisants... Mon âme, Emanom en as-tu espéré, enfin, enfin je crois que je t’ai retrouvée !

J’ai compté les jours, les mois et les années. Pourquoi fut-ce si long, vers quel devenir, pour quelle communion, c’est toi qui me fait naître.

Les autres, les autres m’ont instruite, elles m’ont servie d’essai ! J’ai puisé à leur source la sève de ma vie. J’ai bu. J’ai reçu. J’ai subi et j’ai enfin grandi aux essences mélangées. Toujours studieuse aux coups comme aux caresses, j’ai appris la haine, le mépris même l’indifférence. Je les ai oubliés et maintenant j’attends le bonheur. Je t’attends !




☥☥☥☥☥




J’envie parfois ceux qui vont de l’avant. Nés chaque matin pour une nouvelle vie, mort chaque soir vers un nouvel avenir. Je les envie et je les plains, sans racine, sans rien à offrir à demain. 

J’ai des valises pleines, des cartons qui attendent que je vienne les remplir. Des placards et des buffets pareils à celui de Rimbaud. Des enfants plein la tête émus au pied de leur sapin. J’ai les poches trouées dont les fils écorchés me parlent des épines et des cailloux pointus. Et j’ai des plein paniers d’images, de mots et de dessins où ma main va plonger. J’envie parfois, c’est vrai, ceux qui savent oublier, mais combien je les plains de leurs valises vides, de leur regard rougi de regarder trop loin. Chaque jour pour moi est un hier de plus qui s’ajoute à demain et qui viendra encore remplir ma besace. Mon père , souvent, le dimanche, rentrait de la chasse la gibecière vide, la cartouchière intacte, comme j’en étais heureuse. Les oiseaux pouvaient voler en paix, les lièvres pouvaient sans crainte s’amuser dans les champs, le fusil de mon père n’était pas meurtrier. Comme lui, je ne sais pas chasser. J’erre, je me promène, je divague, je vagabonde et je ne sais ramasser que la couleur du temps, le souffle du vent et les senteurs des prés. Mais eux, je les enferme au fond de mon bagage que je traîne avec moi. Diane oublieuse de ses flèches, mon arc est en ciel et mes traits de couleurs. j’en ai tendu des filets où sèchent et sécheront encore mes récoltent. Et si je ne vais jamais de l’avant, ni porte drapeau, ni battant, j’ignorerai l’oubli. Et si un jour j’avance un peu plus vite ce sera pour voler au temps un morceau de recul, pour m’y re-poser, y faire un point d’appui. Retourner un instant à un instant passé...




☥☥☥☥☥



Mais il arrive parfois que je doute.

Everel m’abandonne et c’est Etilaer qui commande et ordonne. Lucide, sans complaisance ni compassion. je me dis alors que tout n’est et ne fut qu’invention. Divine comédie que je me joue à moi-même sans parvenir à me tromper au bout du compte.

Mais il arrive parfois des jours longs, tristes, ternes. Des jours gris, pire que gris, des jours blancs. Le miroir n’a plus rien de magique, plus de zoom, ni de trompe l’oeil encore moins de clair obscur.
Beaudelaire aimait la pierre, la pureté du marbre et ses lignes sans failles, en cela (en cela seulement j’espère) je ne pourrai jamais le suivre, nos nuages se rejoignent mais pas notre horizon.

Et ces jours uniformes et gris me laissent comme glace. Froide, indifférente, intouchable même. Le miroir est sans teint, neutre, sa lumière crue m’éloigne du reste du monde. Tout est si net alors, si franc, qu’il me semble ne plus jamais pouvoir participer. je me sens exclue et je me sens bien de l’être. Je vois, j’analyse, je ne suis plus que réflexion, tout s’explique sans aucune émotion. je ne suis plus que glace, pire que glace, je n’attends même pas le rayon de soleil qui pourrait me faire fondre.
Ni bonheur, ni malheur...
Est-ce par les plaies ouvertes que c’est vidé mon coeur ?

J’entends encore, je vois, je touche, je sens mais plus rien ne m’émeut. Je reçois mais ne peux plus donner.

Quel vide !

Serait-ce pour mieux après pouvoir refaire le plein ?

La poésie naît de l’émotion.
Ejiom est la corde du violon qui vibre sous l’archet de toutes les fibres de la vie, de toutes les fibres du temps. Le vent a peut-être soufflé trop fort, les rafales ont brisé la tendresse. Aujourd’hui encore je plie sans me rompre jamais et ce n’est ni la bise ni le mistral qui influent mes mouvements, c’est ma seule force, ma seule résistance. J’ai brisé le mur, j’ai brisé l’écran qui me brouillait le monde. En trouvant la raison j’ai perdu l’émotion. Le but n’est plus très loin. Au bout de la page blanche... Mais son air climatisé, son BC, son BG ne me font pas vibrer. J’étais derrière ce mur opaque d’où l’univers entier défilait sans que je parvienne à y trouver ma place et j’ai peur d’être restée au bord du trottoir en tenant la petite fille par la main ! 

Deux âmes seules qui cherchent encore l’âme soeur...
  EMANOM !


Je t’avais promis de ne plus retomber et je t’appelle dans le silence de ma vie d’oublier. Encore des souvenirs réels ou inventés, ils occupent dans mon coeur la même place, me donnent la même chaleur !

Un des plaisirs de l’écriture est de pouvoir vivre tant de choses insensées avec tant d’être proches ou éloignés sans même qu’ils puissent s’en douter ! J’en ai fait des voyages avec eux, inscrits mieux au fond de moi que si je les avais réellement vécus. 

Et bien qu’Etilaer quelques fois m’insupporte, ces jours-là même où Emanom, toi mon âme, tu n’es plus qu’un espoir, un appel, une ombre qui flotte sur la rivière et qui s’évanouit au moindre coup de vent, ces jours-là même, où eux, les autres, sont là, si présents et par qui : 

“ chaque jour sa grisaille à la grisaille pareille, chaque jour le silence à la mort ressemblant “

et à cause de qui :

“ mes vers ne riment plus,

ma prose est poésie,

ma vie n’est qu’un trépas et l’air m’asphyxie...”


Et bien, malgré ces jours où les autres s’accrochent à ms basques pareilles à des méduses gluantes dont je ne puis me défaire, te repoussant toi, Emanom vers le néant d’un grand coup de leurs ailes venimeuses, invisibles et mouvante. Malgré ces jours où le rideau s’affaisse et où le spectacle morne de la vie ordinaire, si vilainement ordinaire, tente de reprendre ses droits - droits qu’elle s’est donnée pour mieux me faire entrer dans son jeu injouable, dans sa farce cruelle, dans sa toile tissée sans fin, sans désert, sans but, sans avenir, sans joie, sans plaisir, sans raison, sans toi Emanom, sans toi ! Oui, malgré tous ces jours où Etilaer me torture, il en est d’autres, sans qu’Everel m’appelle, qui sont calmes et sereins. 

Des jours pasteurisés où j’ai fait attention de passer ma bonne vieille côte aux mailles bien serrées. Des jours de Niel ! J’y vis comme les autres, simplement de l’air du temps, des ragots, des pubs et du ciné... j’agis, je participe  même au grand chantier universel, délaissant un instant le futile Everel pour un peu de raison, préférant presque le sage glaïeul roide au bouton d’églantine... Ces jours-là bien que restant lucide, je vis un moment comme vivent tous les gens et j’aime vivre ainsi, sans questions ! Rageant contre la pluie qui pourrit mes oeillets et contre les enfants qui jouent avec leur temps, souriant aux voisins, choisissant avec soin les légumes du repas...

Ce sont en fait des jours de bain de Jouvance, fraîcheur mentale, clairs même sous la pluie ou dans le brouillard de novembre. Des jours simples d’une vie simple, sans Everel mais où Etilaer se fait douce, non pas par fourberie mais par besoin pour elle de signer un instant l’armistice.
  Une trêve dans la lutte engagée.
  Noël n’importe quel jour de l’année !



☥☥☥☥☥


Everel, Etilaer sont en moi comme deux soeurs siamoises et énemies. Elles luttent pour chacune gagner la meilleure place, m’affaiblir, me conduire, m’exciter... Elles me font vivre sans arrêt, sans repos ! Et avec elles je vais bon train. Je ‘essouffle ou je règle ma marche sur le cours du temps. Mais j’ai peur parfois d’en être encore restée à celui où l’on croyait que la terre s’arrêtait avec l’horizon. 

Le pas à ne pas faire !

La fosse !

Le trou noir!

Freiner au bon moment, pas de marche arrière, une autre direction, c’est là que la terre tourne à l’infini sans jamais, jamais revenir au départ. 

Ce qui fut ne sera plus, ne se répétera pas.
La vie n’a rien à voir avec le grand manège, le défilé éternel, infini des passants .

La vie passe sans qu’on puisse l’attraper, la saisir ne serait-ce qu’un instant. Même pas un film qu’on pourrait repasser, pas d’arrêt sur image pas de gros plans, que des zooms, des flash-back refaits ou inventés... Ce qui fut ne sera plus ni dehors ni dedans. 

Ejiom, Everel, Etilaer, des images enlacées.

Un tout, un rien que je dois préservé.

Un jour petite fille, un jour glace sans teint,le lendemain amour et au soir un refrain.

Nous nous sommes reconnues au fil de l’eau de ma rivière de vie. Nous vivons aujourd’hui en entente familière. Les écueils, les rapides sont nombreux, les rochers acérés... Ejiom aimait déjà la rivière et sa reposante mouvance. Elle voyait Emanom sur sa barque apparaître au milieu de la brume. 

Souviens-toi et j’avais sursauté !



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Maintenant qu’il est là ce petit chemin, qui un jour s’est dessiné devant moi, j’aimerais d’un coup de machette en ouvrir le tracé. Je voudrais le dompter et lui montrer la voie, mais pourrais-je naviguer seule, sans boussole ? J’ai cru que j’étais forte et que je le serais, j’ai cru pouvoir tenir entre mes doigts le sable du sentier sans qu’il puisse s’enfuir. Mais je sens que ma main à nouveau se referme sur le vide..


Emanom où es-tu ?

Es-tu là, seulement sur cette page blanche ? Folie et esperannce doivent-elles uniquement s’épouser ici ?

L’amour simple, nu, ne pourra-t-il jamais ailleurs que sur mes lignes m’enlacer ?

Est-il déjà trop tard ?

Puis-je espérer qu’après tous ces méandres, toutes ces fausses routes, je te retrouverai ?







janvier 1989

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